Séance tenue à la Bibliothèque Royale à Bruxelles, le 18 janvier 2020

Vergadering in de Koninklijke Bibliotheek te Brussel op 18 januari 2020

 

Jean-Marc Doyen,, La monnaie, support de l'écriture

Peu après la création de la monnaie sous sa forme classique, certains utilisateurs ont trouvé intéressant d’utiliser ce support pratique pour transmettre certains « messages » réalisés sous forme de graffiti. Dans le monde grec, certains monnayages sont le support privilégié d’inscriptions, parfois fort longues, mais généralement réduite à quelques lettres dans lesquelles on peut reconnaître des anthroponymes (Elayi & Lemaire 1998). Ainsi, sur les 2141 tétradrachmes du trésor hellénistique de Meydancikkalé publié par A. Davesne & G. Le Rider, pas moins de 636 portent des graffiti en grec, en syllabaire chypriote, en sémitique et en démotique, soit environ 30 % de l’ensemble. Sur plusieurs monnaies d’or d’Alexandre le Grand, ce sont les noms des défunts qui ont été gravés avant que le support ne soit déposé dans leur sépulture. Dans le monde romain, ce sont surtout les monnaies d’or qui ont servi de support à des graffiti. Dans le trésor de Liberchies, ce ne sont pas moins de 56 poinçons et graffiti qui sont attestés parmi les 368 monnaies du dépôt, soit 15 % (Thirion 1972). Cette valeur (16,4 %) se retrouve dans le trésor de la Feldstrasse à Trèves, avec 413 graffiti et/ou poinçons sur 2518 aurei (Gilles 2013). Durant l’Antiquité tardive et sous l’Empire byzantin jusqu’à la fin du VIe s., ce sont surtout des petites croix qui apparaissent de façon très régulière au droit des solidi, avec certaines constantes. L’attention des numismates a été trop peu attirée par ces manipulations qui témoignent de la seconde vie des monnaies et relèvent de l’anthropologie de la monnaie.

Davesne & Le Rider 1989 = A. DAVESNE & G. LE RIDER, Le trésor de Meydancikkale (Cilicie Trachée, 1980), Paris, 1989 (Gülnar 2), 2 vols.
Elayi & Lemaire 1998 = J. ELAYI & A. LEMAIRE, Graffiti et contremarques ouest-sémitiques sur les monnaies grecques et proches-orientales, Milan, 1998.
Gilles 2013 = K.-J. GILLES, Der römische Goldmünzenschatz aus der Feldstrasse in Trier, Trèves, 2013 (Trierer Zeitschrift, Beiheft 34).
Thirion 1972 = M. THIRION, Le trésor de Liberchies. Aurei des Ier et IIe siècles, Bruxelles, 1972.

Cécile Arnould, Les activités numismatiques de Michaël Franz Joseph Muller (1762-1848), magistrat à Echternach et membre correspondant de l’Académie

La numismatique figure parmi les nombreux intérêts historiques de Muller. En octobre 1808, il donne 67 monnaies romaines à la Société des recherches utiles du département de la Sarre qui vient d’être fondée en 1801 (future Gesellschaft für nützliche Forschungen, dont les avoirs archéologiques sont déposés depuis 1877 au Rheinisches Landesmuseum Trier). Ce petit lot accompagne ses deux publications sur les vestiges romains de Bollendorf où il avait découvert une inscription funéraire et peut-être quelques-unes de ces monnaies. Ces écrits furent ses dernières études sur des sujets archéologiques jugeant qu’« un siècle belliqueux ne favorise pas la culture de la science, les muses requérant de la quiétude et de l’encouragement ». C’est néanmoins au titre de témoin de ces époques tourmentées que Muller rassemblera dans une publication d’une trentaine de pages quelques renseignements sur les monnaies ayant circulé dans le duché de Luxembourg. Présenté sous la forme d’un répertoire ce mémoire, publié à Trêves, se basait sur les recherches menées dans les archives de Luxembourg, qu’il consulta fréquemment entre 1792 et 1794. Cet opuscule rare – acquis séparément dans une collection privée par le Cabinet des Médailles - est le premier à se consacrer distinctement à la numismatique luxembourgeoise, bien avant le projet du gouverneur de La Fontaine et les catalogues de Serrure (1893), de Bernays et Vannérus (1910) et de Raymond Weiller (1977).

 

 

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