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Séance tenue à la Bibliothèque Royale à Bruxelles, le 18 décembre 2010
Vergadering in de Koninklijke Bibliotheek te Brussel op 18 december 2010
Présents – Aanwezig : Mmes C. Arnould, Gh. Moucharte en H. Taymans en Dhrn. A. Arles, Ph. Bodet, Y. De Craemere, J.-L. Dengis, H. Dewit, Ch. Doyen, A. Fossion, W. Geets, T. Goddeeris, M. Greganti, J. Moens, M. Rocour, Ph. Sadin, A.-F. Schepers, E. Schutyser, L. Smolderen, J. van Heesch en R. Waerzeggers.
Verontschuldigd – Excusés : Mevr. Ch. Logie, A. Van Haeperen-Pourbaix en N. Vincent en Dhrn. Fr. de Callataÿ, G.-X. Cornet, A. Haeck, P. Pasmans, J. Schoonheyt en R. Van Laere.
Le président ouvre la séance à 14h30 et communique le décès de notre confrère W. Faes, grand connaisseur de médailles et qui a joué un rôle très actif notamment dans la Promotion de la Médaille et comme représentant belge à la FIDEM. Les membres présents respectent quelques moments de silence en son souvenir.
Il signale également que le jury du prix quadriennal a reçu 9 manuscrits totalisant 3.000 pages traitant de sujets divers (2 traitent de la numismatique grecque, 3 de la numismatique romaine, 3 du Moyen Âge et des Temps Modernes, et 1 d’une collection de gemmes). Le jury a unanimement qualifié d’exceptionnel le manuscrit du lauréat le Dr. Adrien Arles, lié au Centre Ernest-Babelon, qui a bien voulu accepter de donner une conférence sur le sujet de ses recherches et de sa thèse de doctorat : Entre monnayage et faux-monnayage, la fabrication de la monnaie au marteau en France (XIIIe-XVIIe siècle) - approche physico-chimique, expérimentale et historique. Le président lui remet le prix au nom de la Société.
M. Arles donne un exposé très documenté sur la technique de la frappe au marteau, pour lequel il s’est basé sur plusieurs sources : d’abord, les édits et ordonnances monétaires de l’époque, puis les comptes d’ateliers monétaires, ensuite les traités monétaires, et enfin, les monnaies mêmes, et plus concrètement, le corpus des fouilles exécutées dans les années 1990 à l’endroit de l’ancien atelier monétaire de La Rochelle (qui a fonctionné du XIVe-XVIIe siècle). On y a retrouvé beaucoup de matériel métallique venant des activités précédant la frappe proprement dite : lames, carreaux, cisailles, flans, etc., mais uniquement pour les monnaies de billon et de cuivre (bien que cet atelier ait frappé aussi des pièces en or, mais dont on n’a pas retrouvé des traces de la fabrication).
Le conférencier s’est efforcé à donner une bonne interprétation des termes qu’on retrouve dans les ordonnances concernant les différentes étapes de la fabrication de monnaies, comme par ex. ajuster les carreaux, rechausser les carreaux, flatir les carreaux, eslaizer les flans, etc. Il s’attarde plus spécialement sur les dispositions visant à limiter la production de cisailles lors de la production de flans (ronds) à partir de carreaux : les autorités imposaient une limite de 12,5% de pertes, ce qui paraît à premier vu inconciliable avec la réalité : en effet, en découpant un flan circulaire d’un carreau (en supposant que les deux ont la même épaisseur), la production de cisailles devrait être de l’ordre de 1 −
π/4 ≈ 21,5%. De l’étude des comptes il s’avère que la limite de 12,5% a effectivement été respectée, ce qui prouve que l’hypothèse d’une même épaisseur pour le carreau de départ et le flan final n’est pas correcte. En d’autres termes, les carreaux devraient effectivement être flatis ; le conférencier a procédé à des tests en partant de lames produites de la même façon qu’à l’époque (notamment via une coulée dans le sable, procédé confirmé par l’absence d’oxydes); ces lames sont ensuite mises en forme par un martelage sur une enclume dans le sens de leur longueur (et pas leur largeur), puis découpés en carreaux. Ceux-ci subissent alors plusieurs opérations du type flatir (= une frappe qui permet de rendre les carreaux plus minces et en même temps plus arrondis). Les flans encore très imparfaits qui sont ainsi obtenus, sont alors empilés et tenus par des pinces, et cette pile est ensuite martelée sur la tranche pour rendre les flans individuels plus homogènes quant à leur circularité (sauf pour les pièces aux deux extrémités des piles, comme le prouvent les trouvailles); c’était ce qu’on appelait rechausser les flans. Les flans sont finalement boués, c’est-à-dire frappés en pile sur l'enclume afin de les rendre tous parfaitement plats. Ils sont ensuite blanchis, c’est-à-dire nettoyés à l’aide de l’acide bitartrate de potassium et du sel. Cette opération enlève les oxydes de cuivre et autres salissures dus au recuit des flans, et produit ainsi une fine couche (ca. 100 μm) d’alliage enrichi en argent par rapport au corps de la monnaie, ce qui lui donne donc un aspect argenté mat. Cette couche spongieuse est alors compactée lors de la frappe proprement dite, ce qui donne un aspect brillant aux pièces neuves. Il résulte d’expérimentations que cet aspect argenté reste présent tant que le taux d’argent (dans l’alliage Ag/Cu) reste supérieur à 10-15%. Notons encore que l’outillage utilisé dans les ateliers monétaires lors du blanchiment (du moins ceux qui frappent des pièces en billon Ag/Cu) est en cuivre, et contrairement à ce qu’on pourrait attendre, pas en fer. Cela s’explique du fait que si on avait utilisé du fer (moins « noble » que le cuivre), ce dernier aurait été oxydé dans la solution de blanchiment entraînant alors la réduction des ions de cuivre passés en solution à la surface des flans blanchis. Il résulterait alors de cette opération un dépôt d’une fine couche de cuivre sur les flans, qui n’auraient alors pas d’aspect blanc (= argent). Le conférencier répète que ses conclusions sont basées sur une analyse des déchets de fabrication trouvés lors des fouilles, ainsi que sur des expérimentations réalisées dans des conditions similaires à celles de l’époque, mais tout en utilisant, pour les analyses métallurgiques, les nouvelles technologies.M. Dengis se demande si le procédé de fabrication, partant d’un carreau plus épais que le flan final, pourrait expliquer l’existence de dénéraux dont le poids est supérieur à celui de la monnaie qu’il est censé représenter (ces dénéraux ayant alors servis pour peser les carreaux).
M. Fossion signale que l’iconographie présente une mise en forme de plaques parallèlement à celle de lames. Le conférencier le confirme.
Le président clôture la séance vers 16h15, après avoir souhaité de Bonnes Fêtes aux membres présents.
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